dimanche 1 janvier 2012

2011 : Printemps arabe, hiver sub-saharien ?

2011 aura été une année incroyable - dans le sens neutre du terme - dans le monde, et en particulier sur le continent africain. A l'heure des bilans en cette fin d'année, une tendance s'est nettement dessinée et continue de mettre un peu plus de distance entre Afrique du Nord et Afrique sub-saharienne.

En effet, au Nord du Sahara, une brise libertaire s'est introduite dans les Etats. Plus ou moins importante, et perçue comme bonne ou mauvaise pour la stabilité et/ou les affaires dans la zone selon les points de vue, elle n'en reste pas moins un fait. Au Maroc par exemple, un certain nombre de réformes ont eu lieu, donnant notamment plus de place dans la sphère politique aux représentants élus par le peuple. La plus représentative pourrait être celle qui permet aux membres de l'Assemblée de désigner directement le premier ministre, alors que c'était jusqu'à présent une prérogative du roi. En Algérie, bien que rien ne semble trop bouger, le pays a connu quelques soubresauts pouvant faire espérer que le gouvernement n'attendra pas qu'il soit trop tard pour ouvrir quelques vannes supplémentaires. Mais le peuple reste méfiant sur les conséquences d'un soulèvement après les années de guerre civile qui ont opposé le gouvernement aux islamistes du G.I.A. En Tunisie, la "Révolution de Jasmin", qui doit maintenant être appelée "Révolution pour la dignité", a fait fuir l'ancien président-dictateur Ben Ali après 23 ans de règne sans partage. Aujourd'hui, les tunisiens restent vigilants suite à l'élection en majorité des islamistes d'Ennahda à l'Assemblée nationale constituante. En Lybie, après des mois de guerre civile et de soutien aéroporté de la France, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, le colonel Khadafi est tombé après 41 ans de confisquation du pouvoir. Un Comité National de Transition prend le relais pour tenter, encore maintenant, de redresser le pays et de satisfaire aux aspirations de chacun, jusqu'ici réprimées. Enfin en Egypte, un premier pas a été fait avec la chute d'Hosni Moubarak, qui était au pouvoir depuis 1981. Un premier pas seulement, puisque suite au déroulement d'une partie des élections législatives, la junte militaire censée garantir la transition semble avoir beaucoup de mal à lâcher du leste.

Ce vent du changement n'aura malheureusement pas franchi le désert cette année. En Côte d'Ivoire, il aura fallu une guerre et l'intervention de l'ONU et de la France pour que le nouveau président Alassane Ouattara puisse accéder à son poste. Depuis, la réconciliation est balbutiante - si tenté qu'elle ait même commencé - et Laurent Gbagbo, l'ex-président, a été expédié siné dié à la Court Pénale Internationale pendant que les crimes des vainqueurs restent, pour le moment seulement l'on espère, impunis. Chez le voisin Burkinabè, le président Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 1987, a fait face à une contestation militaire puis populaire, et réfléchit à modifier la Constitution pour se présenter à un mandat supplémentaire. De même au Sénégal, le président Wade a profité d'une faille dans la réforme constitutionnelle pour briguer un troisième mandat, alors que l'opposition en rangs dispersés propose plus d'une vingtaine de candidats. Cette année toujours, la famine a de nouveau frappé la corne de l'Afrique, entraînant des morts et des déplacés par centaines de milliers. L'aide humanitaire a eu d'abord beaucoup de difficultés à intervenir auprès des populations concernées, jusqu'à ce que les Shebab se retirent de Mogadiscio. Les Shebab justement, groupe terroriste islamiste, ont profité de ce repli stratégique pour tenter de déstabiliser son voisin kényan, par des attentats dans la capitale et des enlèvements d'occidentaux. Le Kenya n'a pas été le seul pays africain victime des mouvements islamistes radicaux. Jusque-là cantonnés dans l'espace sahélo-saharien, ils agissent désormais au Nigéria, par l'intermédiaire de la secte Boko Haram. Plusieurs attentats visant des intérêts occidentaux (siège de l'ONU à Abuja, la capitale) et des chrétiens (églises, restaurants vendant de l'acool) ont été perpétrés, notamment à Noël. Cette année également, des élections ont eu lieu au Liberia, au Cameroun et en République Démocratique du Congo. Présidence sortante en position de force, irrégularités flagrantes dans l'organisation (à l'exception du Libéria), opposition en ordre dispersé, inexistante ou démissionnaire, manifestations houleuses quand la participation a été proportionnelle à l'espoir suscité. Tous les résultats officiels sont aujourd'hui connus. Enfin, terminons sur l'Afrique du Sud, le pays le plus développé de cette partie sub-saharienne du continent, la nation arc-en-ciel qui compte deux Prix Nobel de la paix, la nation de Nelson Mandela et de l'archevêque Desmond Tutu, qui a empêché à l'anniversaire de ce dernier la venue du Dalaï-Lama à l'aide de pirouettes administratives, suite aux pressions de la Chine.

Autant 2011 aura certainement été l'année de l'émancipation au Maghreb, autant l'Afrique noire a encore laissé passer sa chance. On retente l'année prochaine ?

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