dimanche 29 janvier 2012

Quand le virtuel déborde sur notre monde (bel et bien) réel...

Les activités vidéo-ludiques étaient jusqu'à il y a encore quelques années réservées à un public très spécifique. Désormais, la demande est en constante augmentation, notamment grâce à la démocratisation des consoles, à la multiplication des party games et à un équipement des foyers en matériel informatique toujours plus poussé. C'est une tendance récente, et l'on oublie souvent que le jeu vidéo a depuis de nombreuses années maintenant, surtout depuis l'essor d'Internet, participé massivement à la mondialisation tant décriée aujourd'hui par certains de nos politiques. Aujourd'hui véritable phénomène de société, le jeu vidéo au sens large du terme a désormais une véritable répercussion sur nos vies réelles, nous, citoyens du monde, alors qu'il y a quinze ans il tentait de s'imposer comme loisir à part entière.

En effet, de plus en plus d'études sont réalisées autour de la thématique des jeux vidéos, afin de connaître leur impact social, ou leurs possibilités pédagogiques par exemple. Nous restons ici du côté des possibles valorisations de ce médium qui reste relativement nouveau dans nos usages. Au-delà du microcosme de la recherche, la présence des jeux vidéos dans nos vies nous interpellent régulièrement sur des questions de sociabilité (virtuelle et/ou réelle), d'influence des personnes fragiles (violence, identification, souvent relatées à travers des faits divers), ou encore "d'univers parallèles" (modélisation et représentation d'espaces imaginaires ou réels). Tout cela a déjà fait l'objet de brèves, d'articles ou de dossiers plus complets. Avant même la sortie des jeux, tout une nouvelle industrie s'est développée en amont. Une industrie qui employait déjà plus de 10.000 personnes en France en 2008, et dont les limites avec l'industrie du cinéma et de l'informatique s'estompent de plus en plus.

Cependant, ces chiffres très officiels ne sont que la "partie visible de l'iceberg". L'industrie du jeu vidéo est largement plus que cela, sauf que ce n'est plus du ressort des entreprises, mais des joueurs eux-mêmes. Ainsi, en avril 2011, la Banque Mondiale, par l'intermédiaire de son programme InfoDev (Information for Development Program), a notamment fait publié un rapport pointant du doigt une très importante économie souterraine à ce niveau. Celui-ci, intitulé Converting the Virtual Economy into Development Potential - Phase 1: Knowledge Map of the Virtual Economy, consacre une large place aux "Third-party Online Gaming Services", les services relatifs aux jeux vidéos hébergés sur des serveurs spécialisés et en perpétuelle évolution, même en l'absence du joueur. Les plus connus d'entre eux sont par exemple EverQuest ou World of Warcraft. C'est d'ailleurs ce dernier, rassemblant à lui seul plus d'une dizaine de millions de joueurs à travers le monde, qui a été pris en étude de cas pour illustrer le phénomène. D'une façon plus globale, le rapport comptabilise environ 121 millions d'utilisateurs des "Third-party Online Gaming Services" à travers le monde, dont entre 20 et 25%, selon les continents et les niveaux de développement des pays, feraient appel à ce que l'on peut traduire par le terme de "marché secondaire" ("secondary market" dans le rapport).

Effectivement, les jeux de cette nature offrent des services en ligne payants, souvent sous forme d'abonnement mensuel (l'exemple de World of Warcraft est ici tout-à-fait illustratif, avec un accès en ligne moyennant des cartes prépayées ou un abonnement moyen de 16,99$ par mois). Les joueurs paient en réalité la possibilité d'accéder au jeu et à son univers persistent en ligne sur les serveurs de la société Blizzard, ainsi qu'à tous les autres joueurs qui se connectent en même temps que lui (participant d'une sociabilisation en ligne), comme pour tous les "jeux en ligne massivement multijoueurs" (MMO ou MMOG pour Massively Multiplayer Online Game)... Cependant, une fois la partie commencée, celle-ci est alors sans fin, et tout est fait pour que le joueur reste le plus longtemps possible connecté en ligne, moins pour rentabiliser son abonnement que continuer de progresser en même temps que ses partenaires (voire même amis) virtuels. Ainsi, sur World of Warcraft, seuls les joueurs de même niveau peuvent former un équipe. Cela signifie qu'après un certain temps, si l'un des joueurs "décroche", il risque de ne pas autant progresser que les autres membres de son équipe et donc d'être à terme exclu de celle-ci. Pour ne pas subir cette mise à l'écart dans le jeu, qui entraîne également une mise à l'écart sociale, une "solution" existe. C'est le "marché secondaire" évoqué précédemment. Le joueur paie alors un inconnu (par le biais d'une société, un peu moins de 400$ annuels en moyenne) pour "faire vivre" son personnage quand lui n'est pas connecté, en faisant littéralement sous-traiter les actions les plus répétitives du jeu, mais indispensables à toute progression et génératrices de récompenses.

Le "marché secondaire" du jeu vidéo est donc progressivement devenu énorme, prenant de l'ampleur en même temps que "l'originel". Le rapport InfoDev l'estime à plus de 3 milliards de dollars dans le monde. Et comme pour tous les marchés non-officiels et couvrant de tels enjeux financiers, les dérives sont nombreuses. Elles sont régulièrement mises à jour par de journaux d'investigation ou de grands quotidiens ; on parle de goldfarms (littéralement fermes à or), de goldfarmers pour les opérateurs et de goldfarming pour le phénomène, le but étant de "récolter" de l'or virtuel soit directement avec le personnage du joueur, soit pour le revendre aux joueurs par le biais d'Internet sous forme de "crédits" payables en argent réel. Des heures d'enfermement pour les employés, des prisonniers même mis à contribution en Chine car leurs gardiens étaient engraissés par les intermédiaires, souvent jusqu'à ne plus rien voir sur l'écran. Une étude d'un chercheur anglais basée sur des données de 2005 - 2006 rapporte que ce phénomène employait à ce moment-là plus de 150.000 personnes, très majoritairement en Chine, pour un salaire moyen mensuel de 145$.

Alors, est-ce cela le futur du jeu vidéo ? Dans ces conditions, peut-on encore appeler cela un "jeu", qui au départ est synonyme de loisir et de divertissement ? Progressivement, des réglementations se mettent en place, essentiellement dans les pays développés. Mais le sursaut doit venir des joueurs eux-mêmes, qui alimentent constamment ce marché secondaire dans un but qui va toujours plus au-delà d'une simple recherche de l'amusement.




jeudi 26 janvier 2012

Fils, voici ton héritage... - 0

De New York à Tokyo, Tout est partout pareil
On prend le même métro, Vers les mêmes banlieues
Tout le monde à la queue leu-leu

Les néons de la nuit,
Remplacent le soleil
Et sur toutes les radios, On danse le même disco
Le jour est gris la nuit est bleue

Dans les villes,
De l'an deux mille
La vie sera bien plus facile
On aura tous un numéro, Dans le dos
Et une étoile sur la peau
On suivra gaiement le troupeau
Dans les villes, De l'an deux mille

Mirabel ou Roissy,
Tout est partout pareil
Tout autour de la Terre, On prend les mêmes charters
Pour aller où le ciel est bleu

Quand on ne saura plus,
Où trouver le soleil
Alors on partira, Pour Mars ou Jupiter
Tout le monde à la queue leu-leu

Dans les villes,
De l'an deux mille
La vie sera bien plus facile
On aura tous un numéro, Dans le dos
Et une étoile sur la peau
On suivra gaiement le troupeau
Dans les villes, De l'an deux mille

Monopolis

Il n'y aura plus d'étrangers
On sera tous des étrangers
Dans les rues de Monopolis

 
Marcherons-nous main dans la main
Comme en mille-neuf-cent-quatre-vingts
Tous les deux dans Monopolis

 
Quand nos enfants auront vingt ans
Nous on sera d'un autre temps
Le temps d'avant Monopolis

 
Je me vois assise sur un banc
Seule au milieu de Monopolis



Monopolis
Luc Plamondon, Michel Berger
1978 

mardi 24 janvier 2012

Guinée-Bissau : Quel avenir après le décès du président Sanha ?

Le président bissau-guinéen Malam Bacai Sanha, décédé le 09 janvier dernier.
Lundi 09 janvier 2012 décédait le président de la République de Guinée-Bissau, à l'hôpital du Val de Grâce, à Paris, des suites d'une longue maladie liée au diabète, que les médecins n'ont officiellement jamais réussi à diagnostiquer.  Malam Bacai Sanha s'en est donc allé, à presque 65 ans, laissant derrière lui un pays où il a "fait ce qu'il pouvait", dixit les spécialistes de la sous-région.

En effet, la Guinée-Bissau, indépendante depuis septembre 1974 à la suite d'un combat acharné contre le colonisateur portugais, survit tant bien que mal depuis lors. Enclavé entre le Sénégal au nord et la Guinée-Conakry au sud, ce pays d'un million et demi d'habitants pour un territoire presque équivalent à celui de la Belgique compte parmi les moins développés du monde (classé 164 sur 196 concernant l'Indice de Développement Humain de l'ONU, classement 2010). Pourtant, il était promis à un brillant avenir avec son "compagnon de route" de toujours, le Cap Vert, dont l'ancien président Pedro Pires vient d'être récompensé pour sa bonne gouvernance. Leur histoire a en effet été liée pendant des dizaines d'années, depuis l'arrivée des Portugais jusqu'à leur bataille commune pour l'indépendance, incarnée alors par Amilcar Cabral. Ce dernier se fera assassiner après vingt ans de lutte, six mois avant la Révolution des Œillets au Portugal et la prononciation de facto de l'indépendance des colonies. Luiz Cabral, son demi-frère, prendra alors la présidence du pays et souhaitera former une unité entre la Guinée-Bissau et le Cap-Vert. Cette idée sera complètement abandonnée après le coup d'état de Nino Vieira, en 1980, qui contraindra Luiz Cabral à l'exil jusqu'à sa mort. Nino Vieira restera plus de 20 ans au pouvoir, et près de 25 ans dans l'arène politique bissau-guinéenne. Il sera défait une première fois en 1999, après une guerre civile impliquant les militaires, pendant laquelle Malam Bacai Sanha assurera l'intendance de la présidence pendant un an. Nino Vieira reviendra aux affaires en 2005 suite à des élections auxquelles il n'aurait jamais dû participer selon la Constitution. Il sera tout simplement "descendu" en 2009 dans son palais présidentiel, à la suite d'un assaut d'hommes en arme.

C'est alors que Malam Bacai Sanha revint sur le devant de la scène bissau-guinéenne. Il prit la suite du président Vieira, dans un contexte de rivalités inter-armées et de guerre des cartels de drogue. Mais Sanha était avant-tout un homme de la société civile, et non de l'armée. Ancien compagnon idéologique du père de l'indépendance Amilcar Cabral, le président Sanha était d'abord un homme de rassemblement, et un homme qui voulait donner moins de pouvoir à l'armée grâce à la mise en place de réformes volontaristes. Il avait d'ailleurs échappé de justesse à une tentative de coup d'état, en décembre dernier, diligentée par les caciques de la marine nationale dans le même contexte que le président Vieira. Après ces quelques années au pouvoir, le président Sanha s'en est allé, en laissant donc un pays où il a "fait ce qu'il y pouvait", sans homme fort pour lui succéder légitimement. D'après la Constitution, le président de l'Assemblée nationale devait prendre l'intérim, mais l'opposition l'a contesté avant même sa prise de fonction. Ainsi, aujourd'hui en Guinée-Bissau, l'on assiste moins à une rivalité des idées qu'à une rivalité des personnalités, dont aucune n'émerge réellement et qui pourrait faire l'objet d'une relative unanimité. Et surtout, surtout, l'on reste toujours dans cette sorte de "relation incestueuse" entre la société civile et l'armée, dans la mesure où cette dernière, incoutournable mais principal facteur d'instabilité dans le pays, tient plus ici - et depuis l'indépendance - la place d'un pouvoir de l'ombre, avec la complicité des hommes politiques qui pour beaucoup d'entre eux manipulent les factions qui leur sont favorables, que d'un contre-pouvoir éventuellement bienveillant. Le tout se déroule sur fond de plaque tournante du narco-trafic sud-américain à destination de l'Europe.

L'avenir prometteur de la Guinée-Bissau s'est ainsi beaucoup assombri depuis les années 1980, mais il fallait rendre hommage à la seule autre personnalité depuis Amilcar Cabral, l'indépendance et Luiz Cabral, qui aura su, même sur une si courte période, ramener un semblant de calme et d'unanimité dans le pays.

dimanche 22 janvier 2012

La Hongrie ou la gouvernance de l'extrême droite révélée

La Hongrie. Pays d'Europe centrale de dix millions d'habitants, pour une superficie de moins d'un cinquième de la France, la Hongrie est membre de l'Union européenne depuis le 1er mai 2004. Ses voisins directs sont entre autres l'Autriche, la Slovaquie ou encore l'Ukraine et la Roumanie. Jusqu'ici, la Hongrie faisait parler d'elle notamment grâce au rayonnement culturel de sa capitale, Budapest, et politiquement suite à sa présidence de l'Union européenne au premier semestre 2011. Un long fleuve tranquille, ou presque... En effet, la Hongrie provoque de plus en plus de remous depuis quelques semaines maintenant, notamment par le biais de Viktor Orban, son Ministre-Président, et par l'application le 1er janvier 2012 de sa toute nouvelle Constitution ultra-nationaliste, qui vient couronner une longue série de lois, de réformes et de décisions politiques plus loufoques et dérangeantes les unes que les autres. 
 
Arrivé au pouvoir en 2010 avec son parti ultra-conservateur Fidesz (Alliance des Jeunes Démocrates), il mène depuis lors une politique pouvant être qualifiée de dirigiste et de populiste. Dans la foulée des élections législatives, où sa coalition obtient la majorité absolue des voix au Parlement, il fait adopter un amendement constitutionnel relatif à la double nationalité pour les minorités magyares situées hors du territoire national. Premier tollé général pour les voisins directement concernés du pays, qui voient cette décision comme un ingérence pure et simple dans leurs affaires nationales. Fin 2010, il fait également adopter une loi sur le contrôle des médias, qui sera à peine allégée suite aux protestations de l'Union européenne. Les médias publics ont alors été directement placés sous la tutelle directe du parti du Ministre-Président, et près de six cents journalistes et techniciens réputés hostiles au Fidesz ont été licenciés. La loi impose également la production d'une information "équilibrée" et "objective", et n'oublie pas la suppression de la protection des sources. Dans le contexte de crise économique qui frappe la Hongrie de plein fouet, l'autocensure s'est appliquée presque immédiatement. Quant aux rares médias d'opposition, soit ils appartiennent à de grands groupes soucieux de ne pas être financièrement pénalisés s'ils ne reçoivent plus de publicité par le biais de l’État, soit leur licence leur a été retirée.

En 2011, Viktor Orban et son parti frappent encore plus fort. En avril, l'Assemblée nationale adopte à la majorité la Loi fondamentale de la Hongrie, nouvelle Constitution très conservatrice qui s'applique dès 2012. Les grandes lignes du texte sont le changement du nom du pays, qui passe de République de Hongrie à Hongrie, les multiples références aux racines chrétiennes de "l'histoire millénaire" du pays, l'interdiction du mariage homosexuel (le texte précise qu'un mariage ne peut avoir lieu qu'entre un homme et une femme, empêchant tout débat), ou encore la remise en cause de l'interruption volontaire de grossesse (l'embryon est considéré comme être humain à part entière dès son premier jour). Dans le cadre de l'application des différents textes et réformes, Viktor Orban a également proposé de faire appel à des policiers à la retraite pour surveiller les allocataires d'aides sociale ou de chômage, lorsque ces derniers effectueront les travaux d'intérêt général. En effet, la loi les impose dès septembre 2011 pour continuer à bénéficier des aides sociales. Certains observateurs ont dénoncé le retour des "camps de travail" (les Roms, première minorité du pays, sont particulièrement visés par ce texte). Bien évidemment, les règles électorales, ainsi que les critères de nomination des hauts-fonctionnaires, ont été modifiés en profondeur.

Cependant, ces nombreuses réformes liberticides n'ont pas eu la même répercussion sur les membres de l'Union européenne que les textes relatifs à l'économie et aux finances.Le Forint, actuelle monnaie nationale, devient constitutionnellement la devise nationale. Cela signifie de facto que l'adhésion à l'euro de la Hongrie, objectif de Budapest à l'horizon 2020, nécessitera un vote au Parlement avec une majorité des deux-tiers. Par ailleurs, la T.V.A. passe de 25 à 27%, taux le plus élevé de l'Union. Le déficit public est dans le rouge (6,2% pour une norme européenne à 3%) et la dette publique ressemble à un trou sans fond (82,6% du Produit Intérieur Brut). La Hongrie de Viktor Orban pourrait ainsi bien être le premier pays de l'Union européenne sanctionné pour ses dérapages budgétaires. Si la Commission est entendue par les États de l'Union européenne, la Hongrie pourrait alors se voir privée de plus d'un milliard d'euros d'aides européennes. Impôts spécifiques sur les secteurs bancaires, les télécoms et l'énergie où les investisseurs internationaux étaient particulièrement présents, nationalisation des fonds de pension privés... En six mois, la devise hongroise a plongé de plus de 23% face à la monnaie européenne, et les taux d'emprunt explosent. Et pour finir, la mise sous tutelle par le pouvoir de la Banque centrale hongroise (MNB) et l’inscription dans la Constitution d’un taux unique pour l’impôt sur le revenu ont entrainé une véritable défiance des investisseurs.

La Hongrie a désormais besoin de plus de 15 milliards d’euros cette année pour faire face à ses échéances. Budapest a donc été contraint de faire appel à l’aide du FMI et de l’Europe. Le bras de fer est ainsi lancé entre la nécessité européenne de ne pas voir un autre de ses membres sombrer dans une abîme économique sans fin et la volonté de voir le gouvernement hongrois faire marche arrière sur les nombreuses lois contraires aux "valeurs" de l'Union... La Hongrie vient ainsi de démontrer à tous ceux qui y croyaient encore qu'un abandon de la monnaie unique n'est simplement pas une solution et que le protectionnisme à tout prix est en réalité une condamnation sans appel de l'économie nationale.

jeudi 19 janvier 2012

Fils, voici ton héritage... - 6

7:20. Je n'avais jamais pris autant de plaisir à regarder le rapport annuel de productivité. Enfin, de loin, de très loin même. Je le regarde en diagonale, de côté, entre les lignes... Ça pourra donner le change pour aujourd'hui, mais il va falloir que je trouve autre chose ces prochains jours. En même temps, les rapports ici, c'est pas ce qu'il manque...
Nous rions, tous les trois. Nos voix et nos éclats sont comme des échos atténués. Le soleil brille tellement qu'on peut le sentir sur la peau, et il nous réchauffe. Nous nous regardons chacun à tour de rôle, et nous rions. Soudain, elle pointe son doigt vers une petite forme, qui arrive aussi dans un halo lumineux. Je regarde cette forme. C'est un enfant qui s'approche. Je regarde cette forme qui court vers moi en me souriant. Je le prends dans mes bras, et tout mon être atteint un état de simple plénitude.

7:30. Il faut réellement que je trouve un moyen. C'est la deuxième fois ce matin que je me retrouve aux cabinets d'expulsion. Heureusement que je n'avais pas repris de ration sur ma réserve. Pourtant, ça avait plutôt bien fonctionné ce monde alternatif... J'allais mieux... Jusqu'à il y a deux minutes... Comment je vais faire jusqu'à ce soir ? Cette journée s'annonce comme une des pires de ma vie. Pas la pire loin de là, mais ça va être compliqué... Dur... Insupportable... Insolvable... C'était pas censé être aujourd'hui la fin du monde ? Ils attendent quoi à force ? J'ai juste envie d'en finir avec cette douleur. Si seulement c'était juste physique... 

7:40. Et s'il m'arrivait quelque chose au travail ? Je serai directement emmenée pour des soins. Et si je provoquais quelque chose, il faudrait que je sois discrète. Un stratagème... Trop long, il faut d'abord penser à toutes les causes possibles et aux conséquences. Trop compliqué, la sécurité des employés est au niveau le plus élevé, depuis qu'ils se sont aperçus qu'elle était garante d'une majeure partie de la productivité. Trop risqué, si ce n'est pas la fin du monde aujourd'hui et que je suis démasquée, ce sera la fin pour moi tout court... Il y a quelques temps de cela, j'aurais pu feindre un malaise. Il y a quelques temps de cela, j'aurais pu tout arranger avant même d'en arriver là. Il y a quelques temps de cela, la question ne se serait même jamais posée, il n'y aurait pas eu de « problème », tout simplement.

7:50. On me fait signe au pôle V.I.P. Encore une cliente qui aura trop attendu ! Ou non, on ne lui aura pas dit « bonjour » assez vite, ou assez bien, ou même juste assez... Ou parfois, c'est juste pour bien nous rappeler que l'on est simplement là pour eux, à leur disposition, juste pour se faire plaisir en quelque sorte... J'ai l'ensemble du secteur à traverser d'une façon très dynamique ; pour montrer mon enthousiasme et ma détermination à trouver les meilleures solutions... Et c'est même pas sur Coaching TV qu'ils l'ont dit, c'est simplement lors des réunions préparatoires pour le poste, et puis deux fois par an lors des entretiens d'évaluation, et puis régulièrement lors des réunions de motivation des équipes, et des annonces de résultats... Quand j'y pense, c'est le mot d'ordre. Dynamisme, enthousiasme, détermination. Je peux même l'utiliser pour rythmer mes pas... Dynamisme, enthousiasme, déter..............................

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2001 : La COP 7 se conclut par les accords de Marrakech qui présentent la traduction juridique des règles de mise en œuvre du Protocole de Kyoto.
A la précédente conférence, durant les négociations, les représentants du "Carbon Club" auraient fait pression sur les pays en développement, réclamant l’égalité des devoirs en matière d’adoption des quotas d’émission. Cependant, cette demande a paru disproportionnée pour des pays en voie d’industrialisation, venant de la part des pays majoritairement responsables des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, l’accord final proposait des quotas de réduction d’émission revus à la baisse, avec une option prévoyant la revente de « droits d’émission » entre pays riches et pays du G 77 notamment.

mardi 17 janvier 2012

Un an après l'autodétermination du Soudan du Sud

Il y a un peu plus de six mois apparaissait un nouveau pays sur le continent africain et dans le monde, le Soudan du Sud. Né dans la douleur après quasiment un demi siècle de guerre civile et un référendum qui s'est tenu en janvier 2011 et qui a failli ne jamais se dérouler, le Soudan du Sud est devenu dans la foulée le 193e pays membre de l'Organisation des Nations Unies et le 54e de l'Union Africaine. La république fédérale a pour capitale Djouba. Cette ancienne province, auparavant nommée Sud-Soudan, a pris son indépendance de la République du Soudan le 9 juillet 2011. Cette dernière l'a aussitôt reconnue, mais des litiges subsistent quant au tracé de la frontière.

Le Soudan du Sud, bien que très jeune en tant qu’État, a été dès le départ promis à un avenir radieux. En effet, avec des régions fertiles grâce aux nombreux cours d'eau qui la traversent et un sous-sol très riche en hydrocarbures, le pays, bien qu'enclavé, a de nombreux atouts pour un développement économique rapide. Cependant, après toutes ces années de guerre civile et plus de deux millions de morts ces vingt dernières années, les égocentrismes ont beaucoup de mal à s'effacer. Ainsi, après six mois de préparation, qui ont notamment permis de s'accorder sur les modalités du partage de la manne pétrolière avec Khartoum (les hydrocarbures sont au Sud, mais toutes les infrastructures sont au Nord), et six mois de mise à l'épreuve du président Salva Kiir Mayardit et de son gouvernement, le bilan reste mitigé. Bien que le désarmement des milices soit en cours, il reste toujours des éléments non satisfaits de la récupération du pouvoir par le parti du président. Le mécontentement n'est pas un crime en soi, mais chaque "incident" engendre plusieurs dizaines de morts, tant chez les civils que chez les "rebelles", et l'ONU et d'autres programmes de déminage de la région indiquent une augmentation de ces munitions depuis maintenant un an.

A cela viennent également s'ajouter les incidents basés sur des rivalités ethniques. En effet, le Soudan du Sud est un État à part entière depuis plus de six mois, mais n'est pas encore une nation. Récemment, de véritables échauffourées ont éclaté, notamment dans l'Est du pays, entre deux ethnies différentes à propos de vol de bétail. Certaines organisations non gouvernementales parlent d'ores et déjà de plus de 3.000 morts en quelques jours. Ainsi, après des années et des années de guerre civile et une indépendance toute fraîche, les rivalités ethniques revêtent encore une importance particulière car elles viennent s'ajouter au reste des violences qui sont à endiguer. Malgré cela, la population garde espoir et reste très motivée pour donner toutes ses chances au pays. Le "oui" au référendum pour l'indépendance de la région avait très fortement mobilisé et recueilli plus de 98% des suffrages...

dimanche 15 janvier 2012

2012 peut-elle être plus mouvementée que 2011 ?

L'année 2011 vient seulement de se terminer que déjà l'année 2012 s'annonce pleine de rebondissements ! En effet, 2011 avait déjà été bien chargée en actualités et a fait faire un bon nombre d'heures supplémentaires aux journalistes et analystes politiques, économiques, internationaux, etc. Mais vont-ils pouvoir réellement se reposer en 2012 ?

Tout d'abord, côté politique, trois élections présidentielles majeures nous attendent, sans compter celles habituellement sans enjeux pour la France. Nous verrons ainsi se dérouler au printemps prochain les élections présidentielles et législatives françaises, puis présidentielles russes, même si le résultat paraît déjà connu d'avance (mais 2011 nous a bien montré que tout pouvait arriver !), et enfin les élections américaines en fin d'année. Trois élections majeures donc, dont le résultat conditionnera non pas notre avenir de façon générale, mais nos prochaines évolutions à court, moyen et long termes. Ainsi l'élection présidentielle américaine, dont aucune tendance précise ne se dégage pour le moment, fera certainement changer une partie des prévisions économiques pour fin 2012 en fonction de qui sera déclaré vainqueur. L'élection présidentielle française, de son côté, va déterminer les orientations données à notre avenir pour les cinq prochaines années, à moyen terme donc. Elle sera immédiatement suivie des élections législatives, qui pourraient conforter les orientations exprimées quelques semaines plus tôt. En mars, l'élection présidentielle russe, soit-disant sans enjeux ou tout du moins avec peu de doutes possibles quant à son issue, permettra de prolonger notre dépendance énergétique au grand voisin qui continue de voir le pouvoir politique - entre autres - confisqué. Enfin, parmi les élections présidentielles qui ne nous affecterons pas, nous pouvons citer celle du Sénégal, où Abdoulaye Wade convoite un troisième mandat face à, maintenant c'est officiel, Youssou N'Dour notamment. Le Mali votera également pour élire un nouveau président, puisque Amadou Toumani Touré ne se représentera pas après ses deux mandats consécutifs. Présidentielle et législatives se dérouleront le 1er juillet au Mexique, et la présidentielle de Corée du Sud aura lieu en décembre.

Ensuite, côté économique, la crise financière va continuer. Ce n'est pas trop prendre de risque que de dire que les sommets européens et mondiaux vont occuper l'attention médiatique très régulièrement, jusqu'à ce que tout le monde se décide à faire le nécessaire ménage devant sa porte, et ce si possible avant qu'il ne soit trop tard. En France, nous allons enfin connaître le dénouement de cet insoutenable suspense qui nous a tenu en haleine pendant le dernier trimestre 2011 : gardera-t-on notre triple A ? Seule cette question reste incertaine puisque toutes les soit-disant spéculations sur l'abandon de l'Euro en tant que monnaie unique sont au mieux infondées (le changement serait pire que le maintien) et au pire complètement loufoques.

Pour finir, il reste le côté stratégique ou géopolitique, selon son positionnement. Ainsi, la Syrie qui a commencé à se réchauffer aux alentours du Printemps arabe ne trouve pour l'instant pas de solution, et ce ne sont certainement pas les observateurs envoyés récemment par la Ligue arabe qui vont contribuer à en élaborer une, tant ils ont été décrédibilisés. Par contre, si le conflit se poursuit encore et encore, l'on pourrait en venir à une guerre civile, qui déstabiliserait toute la sous-région, déjà fragile. Également, à peine la nouvelle année commencée, l'Iran menaçait de bloquer le détroit d'Ormuz et y faisait quelques essais de missiles. Quand on sait que plus du tiers des exportations de pétrole transitent par ce passage et que le pouvoir iranien, au pied du mur autant à l'international que sur son territoire, n'en est plus à encore se radicaliser mais à plutôt perdre la tête, on se méfie d'une guerre supplémentaire dans la sous-région. Enfin, depuis le décès de Kim Jong-Il en 2011, nous n'avons plus aucun indicateur nous permettant de connaître les grandes lignes, et surtout le niveau de dangerosité, de la nouvelle Corée du Nord de Kim Jong-Un.

Ainsi, à peine 2011 vient-elle de se terminer que 2012 s'annonce deja risquée, au mieux mouvementée...

jeudi 12 janvier 2012

Fils, voici ton héritage... - 5

6:40. Il faut régler la situation au plus vite. C'est décidé. Ce soir je réserverai un créneau horaire pour mon prochain jour de repos. Je n'aurai pas le temps entre mes deux plages de travail. J'aurai bien voulu le faire tout de suite, mais il n'y a pas d'accès possible depuis les ordinateurs de l'entreprise. Et puis de toutes façons, on est pas censés faire autre chose que  travailler. Une alerte serait émise automatiquement vers la salle de surveillance du personnel, et je ne peux pas me le permettre. Quand j'y pense, je ne peux rien me permettre, en fait... Comment en est-on arrivés là ? Comment notre monde a pu en arriver là ? C'est tellement loin de ce que j'ai vécu avec mes parents, c'est encore plus loin de ce que me racontait mon grand-père. Il me parlait de choses qui me faisaient rêver, et elles étaient belles, d'endroits où j'arrivais à m'imaginer, et c'était juste du bonheur. Aujourd'hui, la beauté des choses, le bonheur que peut faire naître un lieu, ça n'existe plus.

6:50. Et si je ferme les yeux, comme avant, qu'est-ce qu'il se passe ? Est-ce que j'irai mieux, un peu ? Il ne faut pas que ça se remarque, il faut que je me cache. Un rapport de productivité sur l'année écoulée, ça fera l'affaire...  
Bleu, le ciel est bleu, parce qu'il y a du soleil, et une légère brise. Il m'emmenait toujours dans cet endroit, dans mes rêves, parce qu'il savait que c'était mon préféré. Verte, l'herbe est verte. C'est comme des petites tiges souples et plates qui recouvrent entièrement le sol, et elles sont vertes, comme ce logo de supermarché. 
C'est peut-être pour ça que j'ai fini ici...  
Et parfois l'herbe est plus haute, et on ne distingue plus ses pieds, comme quand il y a de la mousse dans le bain. Et rouges, jaunes, roses, blanches, les fleurs, ces végétaux maintenant inaccessibles que l'on ne trouve que dans les musées des espèces disparues ou chez les "colorés" les mieux lotis. Elles reviennent, comme avant, comme par magie, comme elles sont belles. Je respire, et je respire leur parfum, c'est le même parfum que celui que portait ma mère. Cette odeur si douce, si envoûtante, elle me manque tellement... Et de l'autre côté, dans cet autre monde tant décrié, est-ce que c'est comme ça aussi ? Est-ce que le soleil arrive encore à faire briller le ciel ? Est-ce qu'ils savent ce que c'est, de l'herbe, sans qu'on le leur ait dit ? 
Stop. Il ne faut pas que l'on me voit. Maintenant j'ai retrouvé le chemin, enfin. Je reviendrai. Très vite oui, je reviendrai.

7:00. Je crois que je viens de trouver une nouvelle façon de m'évader. Je peux toujours penser à ma fille, mais dans des endroits beaux, calmes, où je peux inviter tous les gens que j'aime. C'est tellement apaisant. Je voudrais tellement que cet endroit existe, ailleurs que dans ma tête. D'ailleurs, peut-être que c'est le cas... Après tout, cet endroit existait vraiment avant, mon grand-père me l'a juré, alors pourquoi il n'y en aurait plus maintenant, ou qui y ressemblerait, même juste un peu. Bien sûr, pas ici mais dans l'autre monde, là où tout est possible. Ici, non, un endroit aussi beau, ça provoquerait juste des émeutes...
Et si je pense très fort à elle, elle apparaît et elle marche vers moi. Elle porte une robe légère, dans laquelle elle n'a jamais été aussi belle. Ses cheveux sont détachés, pour une fois, et elle s'approche. Elle me sourit, et le soleil les illumine, elle et le ciel bleu. Elle m'appelle, parce que dans cet endroit, elle a fini d'être en colère. Dans cet endroit, elle me parle, et elle me comprend. Elle s'approche, elle lui tient la main. Il brille aussi, il brille tellement que je ne distingue plus qu'une silhouette. Ils s'approchent, ensemble, et je ne me suis jamais sentie aussi bien...

7:10. Je jette un coup d’œil autour de moi, tout a l'air de fonctionner comme d'habitude. C'est le moment de refaire un tour auprès des opérateurs, comme toutes les heures. Je me sens un peu mieux, c'est déjà un début. Je me sens presque comme avant en quelque sorte. Avant, quand il était encore là, et que je dormais dans ses bras. Avant, quand j'étais triste, et que je pouvais compter sur lui pour remonter la pente. Avant qu'il craque, avant qu'il en ait assez de ce monde, de ce système, et qu'il décide qu'il fallait le changer. Avant qu'il ne passe dans l'ombre, pour que l'on nous laisse tranquille, elle et moi. Avant qu'il ne revienne de l'autre monde, une fois par an, pour s'assurer que tout va bien. Avant. Avant, si j'avais su, je serais partie aussi...

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2000 : COP 6 à La Haye. Reprise des négociations concernant le Protocole de Kyoto. Plusieurs « camps » étaient discernables lors de son ouverture :  le Carbon Club, dont les “Juscanz” (Japon, États-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande), membres de l'OPEP (opposés à l’instauration de quotas), la Russie et la Norvège ;  l’Union européenne, la plus active en matière de défense environnementale ;  certains pays potentiellement menacés par la montée des eaux : Pays-Bas, petites îles et archipels du Pacifique ;  le “G77” qui regroupe actuellement 130 pays en voie de développement.

mardi 10 janvier 2012

Résultats du sondage sur Chronique[s]

Après les vœux de nouvelle année, Chronique[s] revient dépouiller les résultats des votes qui ont été sollicités grâce aux sondages situés dans le menu.

Chronique[s] publie trois articles par semaine...
  • C'est peu... (0%)
  • C'est un bon rythme ! (66%)
  • C'est trop, je ne suis plus ! (34%)

Chronique[s] s'est essentiellement intéressé à l'actualité africaine et à l'environnement...
  • Ces thèmes me conviennent parfaitement. (33%)
  • J'aime aussi la diversité... (33%)
  • On a fait le tour, servez-nous autre chose ! (34%)

Chronique[s] propose des analyses, des présentations et de la fictions...
  • Mouais, bon équilibre... (66%)
  • Il faut privilégier l'analyse ! (0%)
  • Il faut privilégier les présentations ! (0%)
  • Il faut privilégier la fiction ! (34%)

On peut donc en tirer ces premières conclusions : le rythme de trois articles par semaine paraît satisfaisant pour la majorité des votants, alors que les thèmes abordés doivent être diversifiés. D'autres continents seront désormais "représentés" sur le blog. Enfin, il apparaît que les styles proposés soient équilibrés.

En tout cas, merci encore à tous ceux qui ont participé à cette mini-enquête, à tous ceux qui prennent le temps de lire les articles, et même à tous ceux qui ne font que passer ! Rendez-vous dans six mois, pour un nouveau questionnaire...

dimanche 8 janvier 2012

Le Danemark assure la présidence semestrielle de l'Europe

Après six mois de présidence polonaise qui aura été quasi complètement éclipsée par les sommets franco-allemands à répétition dans ce contexte de crise économique, le Danemark prend le relais en ce début d'année 2012, et pour la sixième fois depuis son adhésion. C'est l'occasion pour ce pays d'Europe du Nord, grand comme à peine un dixième de la France (si l'on exclut les provinces autonomes du Groenland et des Îles Féroé), et surtout pour son gouvernement fraîchement élu en septembre dernier, dirigé par la pro-européenne Helle Thorning-Schmidt, de faire ses preuves tant auprès de la population que sur le continent.

En effet, autrefois modèle économique, le Danemark traverse aujourd'hui lui aussi une période économique difficile au même titre que ses voisins européens. Avec une économie essentiellement tournée vers les exportations du fait d'un marché intérieur restreint (un peu plus de 5,5 millions d'habitants en 2011), le Danemark a souffert de la crise. La consommation intérieure, en recul depuis maintenant plusieurs années, devrait continuer à se dégrader, et la TVA de 25 % reste très élevée. Les exportations, essentiellement basées sur l'agriculture (dont une part importante de produits issus de la pêche maritime) et l'industrie spécialisée en niches (trafic maritime, jouets, régulation thermique, haute fidélité...), deviennent plus difficiles et le resteront. Enfin, la compétitivité des entreprises et du marché danois se détériore, comme dans l'ensemble des pays industrialisés, notamment face à la montée en puissance des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). La croissance est donc en baisse rapide depuis plusieurs années.
 
Membre de l'Union européenne depuis 1973, conséquence directe de l'adhésion de la Grande-Bretagne, leur principal client de l'époque, le pays, toujours grand allier des Britanniques et donc indirectement des Etats-Unis, pourrait bien profiter de cette présidence pour se recentrer vers ses voisins directs. Cependant, le Danemark, tout comme le Royaume-Uni, n'appartient pas au club des pays ayant adopté la monnaie unique (le "non" l'a emporté au référendum de septembre 2000 sur cette question, et celui prévu en 2008 a été reporté), et avait même refusé le traité de Maastricht lorsque celui-ci avait été soumis à référendum. Les Danois sont très attachés à tout élément de leur souveraineté nationale, et ne sont pas prêts pour le moment à en abandonner le moindre symbole. Pourtant, le Danemark aura très certainement à cœur de marquer sa présidence par une gouvernance européenne qu'il tentera exemplaire, même si les enjeux et le contexte difficile sont déjà connus à l'avance.

Ainsi, Copenhague entend faire de la relance de la croissance l'un de ses principaux défis. Les négociations sur le budget de l'Union européenne pour 2014-2020 seront également l'un des dossiers phares. Les grandes lignes seront donc la sortie de la crise économique et financière, la restauration de la croissance, l'élargissement de l'espace Schengen et l'achèvement des négociations sur le budget pluriannuel 2014-2020. Enfin, le pays sera contraint de se focaliser davantage sur les sujets financiers et moins sur les sujets écologiques tels que la croissance verte et l’efficacité énergétique, qui tiennent pourtant à cœur le gouvernement. Un beau programme en perspective, certes très chargé et ambitieux, qui n'aura que six mois pour être mis sur les rails...


jeudi 5 janvier 2012

Fils, voici ton héritage... - 4

6:00. Bon cette fois ça devrait aller. J'ai fait une exception pour ce matin. Encore une fois. J'ai avalé mon repas lyophilisé du midi avec quelques heures d'avance. Je reprendrai une portion parmi le stock du magasin qui est mis à disposition des employés. Comme j'avais un peu d'avance par rapport au mois dernier et grâce aux points de qualité positifs que j'ai engrengés en décembre, je peux me le permettre. Il va bien falloir que je me décide à aller voir le médecin à force. Je vais finir par avoir du mal à cacher ces malaises répétés à ma hiérarchie. Et après ? Je suis pas certaine d'avoir envie de savoir. Non. En fait, je crois que je sais déjà. Et puis, si c'est bien ce que je pense, le médecin préviendrait immédiatement les autorités. On peut pas lui en vouloir, c'est son job après tout. On est trop nombreux, ils arrêtent pas de le répéter, aux infos. Et moi, j'irai en camp de réhabilitation, au mieux, un peu comme ma fille. Et elle, qu'est-ce qu'elle deviendrait ?

6:10. J'aurais pas dû autant réfléchir à ces histoires. Ça m'aurait éviter de me rendre compte de la situation dans laquelle je me suis mise. Et lui alors ? Il pourrait m'aider, son père. Quel choix j'ai ? Le déni et advienne que pourra, peu importe les conséquences ; l'acceptation et purger ma peine pour ensuite revenir ici, s'ils veulent encore de moi ; la fuite dans le monde des ombres, celle que je souhaite pour ma fille, après tout, mais celle que je ne suis pas prête à accepter. Il va falloir décider, ça fait une semaine que c'est ce que je me dis. Il va falloir décider. Je ne veux pas décider, c'est trop dur. Le choix est trop dur, les alternatives sont trop dures. Je ne veux pas décider.
 - 老闆,也不會哭了... ...
Merde. J'ai encore chialé en public. Je vais encore devoir me justifier. Je vais encore devoir parler de ma fille et du centre éducatif fermé. Encore. Les gens s'en foutent, mais ça permet de ne pas parler d'autre chose. D'autre chose qui serait répréhensible. En tout cas, pas mal plus que la critique de la religion par une gamine de huit ans. 

6:20. Pendant combien de temps encore je vais pouvoir faire semblant ? Pendant combien de temps encore je vais pouvoir retenir mes larmes jusqu'aux cabines d'expulsion ? J'ai tellement chialé que j'ai vomis. C'était bien la peine, une ration de perdue. Bon... Respiration contrôlée... Concentration maximale avant de sortir... Rien ne doit plus transparaître aujourd'hui. A force, ils pourraient me dénoncer à ceux du dessus. La seule raison qui les pousse pour l'instant à ne pas le faire, c'est qu'ils n'ont pas encore assez de points de qualité positifs pour ensuite prendre ma place. Et s'ils dénoncent sans pouvoir se substituer, ils seront virés, tout simplement. Chacun lutte pour sa survie, c'est la règle, je ne peux pas leur en vouloir. Je vais préparer les rapports de rendement pour la semaine. Aujourd'hui ou demain, c'est pareil. C'est toujours la même chose. Les objectifs sont discrètement relevés d'un cran à chaque fois. Je ferais ça aussi pour l'équipe d'après. Ça me permettra de rester assise quelques heures, et d'arrêter de réfléchir...

6:30. J'y arrive pas. J'ai mal, un peu. Les cocktails de médicaments, de compléments alimentaires et d'aliments lyophilisés, ça doit pas aider non plus. Et bien sûr j'ai pas le droit aux kits spéciaux, vu qu'ils sont disponibles que sur autorisation par un médecin agréé par le gouvernorat. Le médecin. Peut-être que si j'y vais par moi-même en me croyant malade, ils verront que j'ai pas fait exprès. Ça peut marcher, après tout, tous les hommes ne sont pas encore stériles après 35 ans. Même dans mon quartier, ce genre de choses ça arrive. Même chez les "colorés", ça arrive. Sauf que eux, ils ont les moyens que ça ne se sache pas. J'ai mal, un peu. J'ai faim, encore. De toute façon, je vois pas pourquoi je changerai d'alimentation, vu que je vais le perdre. De toutes façons, peu importe l'issue, je me suis préparée à le perdre. La préparation, c'est la clé, comme ils disent sur Coaching TV. Quand on y est préparé, on peut tout surmonter... Je me demande à quel point j'y arriverai, moi.

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1999 : À Bonn (Allemagne), les représentants de 163 pays débattent de la mise en œuvre du protocole de Kyoto lors de la 5e Conférence sur les changements climatiques (COP 5).
Deuxième condition d'entrée en vigueur du protocole : tous les pays l’ayant ratifié doivent émettre au total au moins 55 % des émissions de CO2 de 1990 (condition atteinte le 18 novembre 2004 avec la ratification par la Russie).

mardi 3 janvier 2012

Bonne et Heureuse année 2012 sur Chronique[s]

Chronique[s] vous souhaite une bonne et heureuse année 2012 !

Après ces quelques semaines d'existence, Chronique[s] a permis de diffuser plus d'une dizaine d'articles de présentation et/ou d'analyse de faits d'actualité, principalement africaine, ainsi que quelques coups de gueule, plus ou moins réfléchis.

En 2012, Chronique[s] vous demande votre opinion concernant les parutions (contenu, occurrence, pertinence...). Alors n'hésitez pas à laisser un avis, soit à l'aide des questionnaires ci-contre, soit par commentaire...

Merci à tous, et à bientôt !

dimanche 1 janvier 2012

2011 : Printemps arabe, hiver sub-saharien ?

2011 aura été une année incroyable - dans le sens neutre du terme - dans le monde, et en particulier sur le continent africain. A l'heure des bilans en cette fin d'année, une tendance s'est nettement dessinée et continue de mettre un peu plus de distance entre Afrique du Nord et Afrique sub-saharienne.

En effet, au Nord du Sahara, une brise libertaire s'est introduite dans les Etats. Plus ou moins importante, et perçue comme bonne ou mauvaise pour la stabilité et/ou les affaires dans la zone selon les points de vue, elle n'en reste pas moins un fait. Au Maroc par exemple, un certain nombre de réformes ont eu lieu, donnant notamment plus de place dans la sphère politique aux représentants élus par le peuple. La plus représentative pourrait être celle qui permet aux membres de l'Assemblée de désigner directement le premier ministre, alors que c'était jusqu'à présent une prérogative du roi. En Algérie, bien que rien ne semble trop bouger, le pays a connu quelques soubresauts pouvant faire espérer que le gouvernement n'attendra pas qu'il soit trop tard pour ouvrir quelques vannes supplémentaires. Mais le peuple reste méfiant sur les conséquences d'un soulèvement après les années de guerre civile qui ont opposé le gouvernement aux islamistes du G.I.A. En Tunisie, la "Révolution de Jasmin", qui doit maintenant être appelée "Révolution pour la dignité", a fait fuir l'ancien président-dictateur Ben Ali après 23 ans de règne sans partage. Aujourd'hui, les tunisiens restent vigilants suite à l'élection en majorité des islamistes d'Ennahda à l'Assemblée nationale constituante. En Lybie, après des mois de guerre civile et de soutien aéroporté de la France, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, le colonel Khadafi est tombé après 41 ans de confisquation du pouvoir. Un Comité National de Transition prend le relais pour tenter, encore maintenant, de redresser le pays et de satisfaire aux aspirations de chacun, jusqu'ici réprimées. Enfin en Egypte, un premier pas a été fait avec la chute d'Hosni Moubarak, qui était au pouvoir depuis 1981. Un premier pas seulement, puisque suite au déroulement d'une partie des élections législatives, la junte militaire censée garantir la transition semble avoir beaucoup de mal à lâcher du leste.

Ce vent du changement n'aura malheureusement pas franchi le désert cette année. En Côte d'Ivoire, il aura fallu une guerre et l'intervention de l'ONU et de la France pour que le nouveau président Alassane Ouattara puisse accéder à son poste. Depuis, la réconciliation est balbutiante - si tenté qu'elle ait même commencé - et Laurent Gbagbo, l'ex-président, a été expédié siné dié à la Court Pénale Internationale pendant que les crimes des vainqueurs restent, pour le moment seulement l'on espère, impunis. Chez le voisin Burkinabè, le président Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 1987, a fait face à une contestation militaire puis populaire, et réfléchit à modifier la Constitution pour se présenter à un mandat supplémentaire. De même au Sénégal, le président Wade a profité d'une faille dans la réforme constitutionnelle pour briguer un troisième mandat, alors que l'opposition en rangs dispersés propose plus d'une vingtaine de candidats. Cette année toujours, la famine a de nouveau frappé la corne de l'Afrique, entraînant des morts et des déplacés par centaines de milliers. L'aide humanitaire a eu d'abord beaucoup de difficultés à intervenir auprès des populations concernées, jusqu'à ce que les Shebab se retirent de Mogadiscio. Les Shebab justement, groupe terroriste islamiste, ont profité de ce repli stratégique pour tenter de déstabiliser son voisin kényan, par des attentats dans la capitale et des enlèvements d'occidentaux. Le Kenya n'a pas été le seul pays africain victime des mouvements islamistes radicaux. Jusque-là cantonnés dans l'espace sahélo-saharien, ils agissent désormais au Nigéria, par l'intermédiaire de la secte Boko Haram. Plusieurs attentats visant des intérêts occidentaux (siège de l'ONU à Abuja, la capitale) et des chrétiens (églises, restaurants vendant de l'acool) ont été perpétrés, notamment à Noël. Cette année également, des élections ont eu lieu au Liberia, au Cameroun et en République Démocratique du Congo. Présidence sortante en position de force, irrégularités flagrantes dans l'organisation (à l'exception du Libéria), opposition en ordre dispersé, inexistante ou démissionnaire, manifestations houleuses quand la participation a été proportionnelle à l'espoir suscité. Tous les résultats officiels sont aujourd'hui connus. Enfin, terminons sur l'Afrique du Sud, le pays le plus développé de cette partie sub-saharienne du continent, la nation arc-en-ciel qui compte deux Prix Nobel de la paix, la nation de Nelson Mandela et de l'archevêque Desmond Tutu, qui a empêché à l'anniversaire de ce dernier la venue du Dalaï-Lama à l'aide de pirouettes administratives, suite aux pressions de la Chine.

Autant 2011 aura certainement été l'année de l'émancipation au Maghreb, autant l'Afrique noire a encore laissé passer sa chance. On retente l'année prochaine ?